Le mois de décembre 1944 est très froid : exercices, cours, manœuvres, marches de nuit dans la neige se succèdent. Je fais connaissance avec l’Armée. Nous sommes deux sections de quinze filles avec deux femmes officiers (une française et une anglaise) et deux hommes sous-officiers en tant que chefs de section. Un peu dur ce stage quand on sort du cocon familial mais il se passe dans une très bonne ambiance. Je me fais de nouvelles camarades.
Lorsque nous en avons terminé, le P.C. de l’Armée a encore avancé, nous nous retrouvons à Belfort.
Ma formation de secrétariat et comptabilité ne me rend pas très utile aux Transmissions. On me fait faire, en 2 semaines, un stage de télétypiste, puis –enfin- je suis affectée au Centre Hibou, P.C. arrière de l’Armée. Mes amies de Beaune sont, elles, au Centre téléphonique Hirondelle, P.C. avant de l’Armée. Je ne me suis donc jamais retrouvée avec elles.
Puis, ce que j’appelle le travail sérieux commence : horaires assez décousus, nuits de 12h, le service devant être assuré 24h sur 24. Il faut apprendre par cœur les indicatifs de toutes les unités reliées par télétype car il est défendu de noter quoi que ce soit. Peu importe, à 19 ans, la mémoire est bonne! Nous avons aussi de très longs messages chiffrés à transmettre par groupe de 5 chiffres, le destinataire devant les collationner. Fatigant à 4h du matin!
A Belfort, c’est l’infirmerie de la caserne qui sert de cantonnement au personnel féminin. C’est presque chauffé, un luxe par cet hiver-là. Nous inaugurons les pantalons que vous avons trouvés dans nos paquetages et même les caleçons d’hommes : c’est le fou-rire dans la chambrée, le soir, lorsque nous nous déshabillons!